414- Amérique, Europe, Russie : les calculs de puissance

...Maintenant, l'Amérique ne soutient plus l'Ukraine pour une guerre longue. Mais elle fait le même calcul : affaiblir la Chine. Trump essaye de faire ami-ami avec la Russie, en espérant que la Russie va s'éloigner de la Chine. C'est une autre façon de l'affaiblir. Au passage, les 38 millions d'Ukrainiens sont traités comme un pion qu'on déplace sur un jeu d'échecs. Mais toutes les grandes puissances sont capables de cela, depuis bien longtemps...

            L'Amérique de Trump joue avec l'Ukraine : un coup je t'aide avec mes armes, un coup j'arrête. Au moment de l'entrée de l'armée russe en Ukraine, il y a 3 ans, l'Amérique avait décidé de soutenir l'Ukraine, avec des armes et de l'argent. Elle avait aussi entraîné l'Europe avec elle dans ce soutien. 

            Au début de la guerre, en 2022, le calcul américain était de profiter du fait que l'Ukraine résistait fortement à la Russie, ce que personne n'avait prévu. En faisant durer la guerre, l'Amérique pensait affaiblir ainsi la Russie. Et cela, sans avoir un seul soldat américain à devoir risquer sa vie.

            Pourquoi affaiblir la Russie ? Parce que la Russie était en train de se rapprocher de la Chine. Il y avait même un accord militaire entre eux. Affaiblir la Russie, c'était donc affaiblir un allié de la Chine. C'était donc, indirectement, affaiblir la Chine. Et pourquoi l'affaiblir ? Parce que l'Amérique est en train de se faire rattraper, et même dépasser dans certains domaines, par la Chine.

            Dans leur monde capitaliste, Chine et Etats-Unis sont forcément en concurrence, en guerre économique. Car celui qui se retrouve le premier, le plus fort, a de gros avantages sur tous les suivants. La position américaine de première puissance dans le monde, avec son dollar utilisé partout, est donc menacée par la Chine. Voilà quel était le calcul.

            Maintenant, l'Amérique ne soutient plus l'Ukraine pour une guerre longue. Mais elle fait le même calcul : affaiblir la Chine. Trump essaye de faire ami-ami avec la Russie, en espérant que la Russie va s'éloigner d'elle. C'est une autre façon de l'affaiblir.

            Au passage, les 38 millions d'Ukrainiens sont traités comme un pion qu'on déplace sur un jeu d'échecs. Mais toutes les grandes puissances sont capables de cela, depuis bien longtemps.

            Il n'est pas certain que Trump garde cette position avec la Russie. Il va sans doute regarder si la Russie veut bien se rapprocher de l'Amérique, et s'éloigner de la Chine. En attendant, son nouveau jeu a un avantage pour l'Amérique : il divise l'Europe.

            Trump a clairement annoncé que l'Europe ne devait plus compter sur sa protection militaire. On ne le sait pas, mais il y a 100 000 soldats américains en Europe. Et avec eux, il y a les bombes atomiques américaines, qui protégeaient l'Europe du temps de l'URSS.

Là encore, c'est pour pouvoir concentrer ses forces à viser la Chine, que Trump enlève sa protec-tion militaire sur l'Europe. Du coup, c'est la panique en Europe. Certains, la France en tête, sont pour que l'Europe se fabrique son armée européenne. Mais d'autres, comme la Hongrie, sont contre. D'autres veulent essayer de rester ami-ami avec l'Amérique. Les uns veulent monter des usines d'armement européennes. Les autres sont pour acheter des armes à l'Amérique.

            Une Europe divisée, c'est une bonne affaire encore pour l'Amérique. Car l'Europe aussi est un gros concurrent pour l'Amérique. Certes, la richesse de l'Amérique est plus grande, avec 25 000 milliards de dollars, que celle de l'Europe, avec 17 000 milliards (en PIB). Mais d'un autre côté, l'Amérique ne regroupe qu'un marché de 333 millions d'habitants, alors que l'Europe en a 740 millions. 

            La France aussi a son calcul. On l'a vu, elle se dit pour une armée européenne, avec du matériel européen. La France a des usines capables de fabriquer toutes sortes d'armements, et elle en a plus que les autres. Elle cherche donc à se retrouver numéro un pour l'industrie de guerre... à l'échelle de l'Europe. De très bonnes affaires en vue donc pour Thales (radars, guidages de missiles), Dassault Aviation (avions Rafale), Safran (moteurs militaires), Naval Group (navires de guerre, sous-marins nucléaires), MBDA (missiles sol-air, mer-air, air-air), et bien d'autres. 

             Que la montée en puissance de toutes les armées nous rapproche de la guerre, on l'oublie. On nous rassure en disant : "qui veut la paix prépare la guerre".

            Le monde capitaliste est basé sur la concurrence des travailleurs entre eux, des patrons entre eux, des pays entre eux. Il a le conflit dans les gènes. Jean Jaurès le disait déjà avant la Première guerre mondiale : "Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage».

            La question qui se pose, c'est de construire un autre monde. Un monde basé non pas sur la concurrence, mais sur le partage et sur l'entraide. C'est d'abord aux peuples de le vouloir.

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