...Israël refuse de laisser exister dignement les Palestiniens, le Hamas refuse de reconnaître l’Etat d’Israël. Mais il n’y a pas un trait d’égalité entre les deux parties. C’est le refus têtu des dirigeants d’Israël de donner une place juste et démocratique aux Palestiniens -et aux Arabes vivant en Israël-, c’est ce refus qui entretient l’état de guerre, et la fait régulièrement exploser.
Les Israéliens ont été sidérés par l’attaque du Hamas venu de Gaza le 7 octobre 2023. C’est qu’ils avaient fini par croire en leur gouvernement. On leur assurait avoir construit un mur bourré de magnifiques technologies autour de Gaza. On leur répétait que leurs services secrets étaient les meilleurs du monde, qu’ils pouvaient arrêter n’importe quelle menace.
Leur pays a signé des accords avec de nombreux pays arabes : depuis le traité de paix avec l’Egypte en 1979, jusqu’aux accords d’Abraham en 2020 avec Bahrein, les Emirats arabes unis, le Soudan, le Maroc. Et bientôt, ce devait être avec l’Arabie saoudite. Les Israéliens n’avaient donc plus rien à craindre.
Mais tous les dirigeants qui ont signé ces accords, tous ceux aussi qui ont voulu croire que la question palestinienne était ainsi réglée, ont oublié et abandonné à leur sort des millions de personnes : les Palestiniens.
Deux millions de Palestiniens sont parqués dans un territoire minuscule, trois fois la surface de Paris : Gaza, gouverné par le parti religieux Hamas, et complètement bouclé par Israël. Quatre millions de Palestiniens vivent à 40 km de là, en Cisjordanie, un territoire en principe gouverné par des Palestiniens. Mais Israël n’arrête pas d’y grignoter la terre, il y implante ce qu’il appelle des colonies (certaines sont devenues des villes) avec 500 000 Israéliens ultra religieux ; et il construit pour eux des routes, qui sont également protégées par l’armée israélienne.
Enfin, trois millions de Palestiniens sont réfugiés dans d’autres pays de la région, en Jordanie, au Liban, en Syrie, survivant dans des camps, souvent sans même le droit de travailler.
Les Palestiniens, c’est donc quelque dix millions de personnes méprisées, humiliées. Elles considèrent qu’Israël est responsable de leur sort malheureux, et elles transmettent, de génération en génération, l’espoir, le rêve, de retrouver un jour la terre où ils vivaient, eux ou leurs ancêtres, jusqu’à l’arrivée de ce pays nouveau, en 1948, Israël.
Depuis 75 ans, les dirigeants d’Israël n’ont jamais voulu régler ce qu’on appelle la question palestinienne. Ils ont préféré que se mette en place une sorte d’état de guerre permanent. Un avantage est que cela fait taire les oppositions en Israël, vite qualifiées de traîtres. Mais cela a fini par amener au pouvoir une extrême droite et des religieux fanatiques.
Le Hamas est un parti religieux, islamiste. Quand il a été créé en 1987, les dirigeants israéliens ont fait le choix de l’épargner, et de frapper plutôt sur l’OLP, qui n’était pas du tout religieux. L’idée des dirigeants israéliens était de diviser les Palestiniens, pour les affaiblir plus encore.
En 2005, pour mieux concentrer ses troupes sur la Cisjordanie souvent révoltée, Israël a décidé de les sortir de Gaza. Deux forces politiques palestiniennes se sont donc retrouvées face à face, le Hamas et l’OLP. L’OLP a demandé à Israël de pouvoir ramener des renforts, qui lui manquaient, de Cisjordanie. Israël a refusé, et cela a abouti à la victoire du Hamas, seule depuis à tout contrôler à Gaza. Et il ne laisse pas de liberté là où il gouverne.
Dès que le Hamas est entré en Israël, cela a enthousiasmé une partie des populations palestiniennes et arabes, car cela efface, à leurs yeux, une humiliation de 70 ans. Mais le Hamas a utilisé des méthodes insupportables contre les civils israéliens. Et les dirigeants israéliens veulent y répondre en bombardant des habita-tions, en asphyxiant toute la population de Gaza.
Israël refuse de laisser exister dignement les Palestiniens, le Hamas refuse de reconnaître l’Etat d’Israël. Mais il n’y a pas un trait d’égalité entre les deux parties. C’est le refus têtu des dirigeants d’Israël de donner une place juste et démocratique aux Palestiniens -et aux Arabes vivant en Israël-, c’est ce refus qui entretient l’état de guerre, et la fait régulièrement exploser.