377- Retraites : la racine du problème

            … Le monde des patrons prend de plus en plus de la richesse du pays, en proportion, et il en laisse de moins en moins au monde des salariés. Forcément, les caisses de retraite, qui vivent des salaires ont régulièrement des difficultés.

            La soi-disant solution que propose Macron, après Hollande, Sarkozy, Chirac et Mitterrand, c’est encore et toujours d’exploiter un peu plus longtemps les salariés, pour la plupart des ouvriers, des employés. Cela ne peut tout simplement pas être une solution…

            Cela fait des dizaines d’années que les gouvernements changent les règles du système des retraites, soi-disant pour le sauver. Chaque fois, on allonge la durée pendant laquelle il faut avoir travaillé et cotisé, ou on retarde l’âge où l’on peut prendre sa retraite, ou les deux à la fois.

            Ils ont un argument en béton : comme nous vivons plus longtemps, il y a plus de personnes à la retraite, et elles y restent plus longtemps. Résultat, le nombre de retraités augmente plus vite que le nombre de ceux qui travaillent et qui cotisent pour le système des retraites. Or, c’est l’argent de ceux qui travaillent qui paye le système des retraites. En 1960, pour 1 retraité, il y avait 4 actifs ; maintenant, il y a à peine 2 actifs, et cela va s’aggraver.

            Conclusion, leur conclusion : vous voyez bien, ce n’est pas tenable comme ça. Il n’y a qu’une solution, c’est de travailler plus.

            C’est comme cela qu’en 1993, Mitterrand président et Balladur Premier ministre ont fait passer la durée de cotisation de 37,5 à 40 années dans le secteur privé. En 1995, Chirac et Juppé ont voulu en faire autant dans le public et pour les régimes spéciaux, mais une grève générale les en a empêchés. Huit ans plus tard, Chirac et Fillon vont y arriver, en 2003. Les choses s’accélèrent avec Sarkozy : en 2010, l’âge va monter progressivement jusque 62 ans ; en 2014, Hollande et Ayrault allongent la durée de cotisation vers les 43 années. Et en 2023, Macron et Borne veulent revenir sur l’âge de départ pour l’amener à 64 ans.

            Pas étonnant que des jeunes se demandent aujourd’hui s’ils auront droit à une retraite !

            Revoyons les choses à la base. Ce qui paye les retraites, on l’a dit, c’est de l’argent qui vient des salariés. On peut le voir sur un bulletin de salaire : les lignes « retraite », c’est le plus gros de ce qui est enlevé du salaire brut.

            Aujourd’hui, on nous dit qu’il n’y a pas assez d’argent pour payer les retraités. Il y a donc une solution toute simple : augmentez les salaires. Et ce qui va aux retraités va augmenter. Pas besoin d’allonger l’âge de départ ou le nombre d’années.

            On va évidemment nous dire « Mais ce n’est pas possible, les patrons ne peuvent pas augmenter les salaires ! » Tiens donc ! En freinant les salaires, la part que le monde des patrons et des capitaux se prend n’a pas arrêté d’augmenter depuis 40 ans. Dans les années 1980, quand 100 euros de richesse nouvelle étaient produits grâce au travail, il en revenait 29 au monde des patrons et des capitalistes. Maintenant, ils en prennent 37 !

            Le monde des patrons prend de plus en plus de la richesse du pays, en proportion, et il en laisse de moins en moins au monde des salariés. Forcément, les caisses de retraite, qui vivent des salaires ont régulièrement des difficultés.

            La soi-disant solution que propose Macron, après Hollande, Sarkozy, Chirac et Mitterrand, c’est encore et toujours d’exploiter un peu plus longtemps les salariés, pour la plupart des ouvriers, des employés. Cela ne peut tout simplement pas être une solution.

            Leur arnaque, c’est de ne surtout pas parler de la manière dont est partagé le gâteau des richesses que crée le travail de millions de travailleurs. La base du problème est là : la part de l’argent qui va aux patrons et aux capitalistes a augmenté d’un quart en 40 ans. Avant cette période, les salaires s’amélioraient et les caisses de retraite n’avaient pas de problème. L’âge de départ a même pu être abaissé de 65 à 60 ans par Mitterrand en 1982. Le problème, ce sont les salaires qui n’augmentent pas assez, en tout cas bien moins que la richesse du pays, et que ce qu’empochent patrons et financiers.

            Il faut lutter, pour les retraites, pour les salaires. Mais en même temps il faut lutter pour une autre société que ce capitalisme rapace qui, au jour le jour et sur des dizaines d’années, n’a qu’une idée en tête : amasser le plus possible, et ne lâcher que le minimum si la colère gronde.

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