…Si les dirigeants de l’Europe protestent, ce n’est pas tant par souci humanitaire : ils n’en font pas beaucoup preuve quand ils laissent crever en mer des milliers d’immigrés qui cherchent un droit d’asile. Non, les dirigeants européens mettent des sanctions parce qu’ils espéraient que l’Ukraine ferait partie de leur camp. L’Ukraine était pour eux une aubaine : le salaire moyen est si bas en Ukraine (200 euros) que 3 millions d’Ukrainiens sont partis travailler en Europe. Et 8 autres millions partent aussi plusieurs mois par an. L’Europe a fait de l’Ukraine un réservoir de main d’œuvre bon marché…
La guerre qui a lieu aujourd’hui en Ukraine oppose deux camps qui semblent très différents. L’un paraît puissant, cruel, sanguinaire ; l’autre semble démocratique, épris de liberté, et bien faible. Mais méfions-nous des apparences !
La guerre a été déclenchée par la Russie, qui dispose d’une armée dix ou trente fois plus puissante que l’armée ukrainienne. Le chef de cette guerre, le président Poutine, bien connu comme étant un dictateur, a été jusqu’à déclarer que l’Ukraine n’existait pas, qu’elle était une invention complète.
En face, le camp occidental, Etats-Unis en tête, et derrière eux la presque totalité de l’Europe, n’envoie aucun soldat en Ukraine ; il ne décide que des sanctions économiques contre les dirigeants russes. Eux n’envoient des soldats que dans les pays de l’OTAN proches de la Russie, comme la Pologne ou la Roumanie. Bref, ils respectent les lois internationales, disent-ils.
C’est vrai, le monde occidental se montre moins violent. Mais les Etats-Unis, l’Europe, sont devenus des puissances considérables en étant affreusement violents : massacre de millions d’Indiens, esclavage de millions de Noirs aux Etats-Unis ; commerce et exploitation d’autres millions d’esclaves par la France, l’Angleterre, etc., puis colonisation et exploitation sauvage de l’Amérique du Sud, de l’Asie, de l’Afrique. Les pays européens se sont ensuite fait la guerre en Europe même pour se partager ou se repartager les territoires et les richesses accumulées, pendant des siècles.
Ces siècles de violence, il en reste des traces humaines : dans les racismes, avec les immigrations, dans le terrorisme islamiste. Il en reste des traces aussi dans les machines et les usines du monde occidental, bigrement plus puissantes, et dans les armes, ultra-perfectionnées ; au point que le monde occidental pleure chaque soldat tué, alors que ce soldat fait en moyenne des centaines de morts dans le monde exploité et encore dominé.
Enfin et surtout, il en reste des traces dans le monde économique. L’Europe paye des dizaines de milliards à ses agriculteurs, grâce à quoi les produits européens sont vendus très peu chers en Afrique, ce qui tue à petit feu une population essentiellement paysanne : pas besoin de balles ou de mitrailleuses !
Et c’est vrai aussi sur le plan politique. L’argent américain ou européen attire des étudiants des pays dominés, ils sont éduqués dans les écoles des Etats-Unis et d’Europe. Après quoi un certain nombre vont ensuite revenir faire les dictateurs dans leur pays, dictateurs dévoués à obéir aux intérêts du pays qui les a éduqués. Plus besoin d’envoyer l’armée occidentale pour placer ces hommes.
Voilà le système qu’ont mis en place les USA et l’Europe, les deux grandes puissances qui sont sorties de la violence de la deuxième Guerre mondiale. C’est un long passé de violence et de richesse accumulée qui leur permet d’agir « proprement ».
Seulement, voilà. Tous les systèmes d’exploitation et de domination finissent par s’user. La France est rejetée par la population en Afrique de l’Ouest. La Chine veut sa place ; elle copie une manière occidentale de piller les pays pauvres : elle leur prête de l’argent, et s’arrange pour qu’ils aient un mal fou à rembourser leur dette : l’argent des intérêts rentre alors tout seul, pouvant doubler la mise.
Et que fait Poutine, quand il envahit le territoire ukrainien ? Il veut accroître la puissance de la Russie, il veut modifier le partage mondial de la domination. Et pour cela, il en revient aux bonnes vieilles méthodes par lesquelles l’Occident avait commencé : il a occupé une partie de la Géorgie en 2008, la Crimée en 2014, là c’est l’Ukraine.
Si les dirigeants de l’Europe protestent, ce n’est pas tant par souci humanitaire : ils n’en font pas beaucoup preuve quand ils laissent crever en mer des milliers d’immigrés qui cherchent un droit d’asile. Non, les dirigeants européens mettent des sanctions parce qu’ils espéraient que l’Ukraine ferait partie de leur camp. L’Ukraine était pour eux une aubaine : le salaire moyen est si bas en Ukraine (200 euros) que 3 millions d’Ukrainiens sont partis travailler en Europe. Et 8 autres millions partent aussi plusieurs mois par an. L’Europe a fait de l’Ukraine un réservoir de main d’œuvre bon marché.
Le camp occidental n’utilise pas la violence… pour l’instant. Mais dès qu’il jugera en avoir besoin, sachons qu’il est capable du pire. Avec un beau vernis démocratique ou sans, les puissants de ce monde sont tous des ennemis des peuples.