... L’enfant qui prend des coups n’apprend rien. Il ne comprend pas pourquoi il ne devait pas frapper, pourquoi il ne devait pas toucher cet objet fragile, pourquoi il ne doit pas parler de cette manière. Des études ont montré que les fessées, les claques, ne l’aident pas. Cela ne fait qu’aggraver les choses ; elles le rendent plus agité, plus agressif. Par contre, il ira mieux si on arrête de le frapper. Mais alors, comment faire ?
On est tous choqués, indignés, chaque fois qu’on nous parle d’une violence commise par des enfants. On pense que c’est la vie adulte qui est responsable d’une certaine violence, et que les enfants devraient en être protégés. Mais il y a une violence qui n’est presque jamais dite : celle que subissent encore des enfants pour leur éducation.
Beaucoup de parents considèrent qu’il est normal qu’il arrive de frapper son enfant. Si on l’aime, on veut lui apprendre la vie, les valeurs. Et comment faire lorsqu’il bat son frère ? Ou lorsqu’il se met en colère, qu’il refuse d’obéir ? Et si le parent n’est pas respecté ? Nous-mêmes, avons souvent été éduqués avec des coups.
Lorsque l’on frappe un enfant, il arrête tout de suite de faire ce pourquoi on l’a frappé. On pense donc qu’on a bien agi. Qu’il a compris. Mais en réalité, il n’a rien compris du tout. Les coups, la surprise, la douleur, n’ont fait que le bloquer complètement, le sidérer. C’est une réaction de défense qu’ont de nombreux animaux, et l’homme en a hérité. Une partie du cerveau, l’hippocampe réagit très vite en cas de danger : on se sauve, on agresse, ou on se bloque : on ne bouge plus, on fait le mort.
L’enfant qui prend des coups n’apprend rien. Il ne comprend pas pourquoi il ne devait pas frapper, pourquoi il ne devait pas toucher cet objet fragile, pourquoi il ne doit pas parler de cette manière. Des études ont montré que les fessées, les claques, ne l’aident pas. Cela ne fait qu’aggraver les choses ; elles le rendent plus agité, plus agressif. Par contre, il ira mieux si on arrête de le frapper. Mais alors, comment faire ?
Cela fait des siècles et des siècles qu’on a frappé et qu’on continue de frapper les enfants pour les éduquer, les faire grandir. On pourrait même penser que nos ancêtres, les hommes de la préhistoire, ne devaient faire que cela.
Mais non ! Au contraire, dans des dizaines de petites sociétés qui sont restées à vivre un peu à la manière des hommes de la préhistoire, dans des endroits reculés du monde, on ne frappe pas du tout les enfants. On ne leur crie pas dessus, on ne leur fait pas du chantage, on ne se moque pas d’eux. On ne les menace pas de les abandonner, ou de ne plus les aimer.
Oui, c’est très étonnant, mais ces humains sont en fait plus civilisés que nous là-dessus. Les chercheurs qui ont vécu avec eux ont vu une foule de façons de faire autrement. Deux enfants se disputent ? On les sépare calmement, on ne les punit pas, on reste auprès de chacun, l’adulte montre une attitude tranquille. L’enfant se met en colère contre un adulte, il se sent frustré de ne pas avoir ce qu’il veut ? Même chose : l’adulte montre qu’il n’est pas touché par cette colère. L’enfant tape un adulte ? L’adulte ne réagit pas comme s’il avait affaire à un étranger, il calme et explique que cela ne se fait pas. Ensuite, lorsque l’enfant se sent mieux, qu’il est vraiment en état d’écouter, peut venir le temps de l’explication.
Petit à petit, l’enfant grandit de cette manière dans un monde où la violence est mise à l’écart, aussi bien celle des coups que celle des paroles, des menaces. Avec le temps, il apprend à régler les problèmes, les conflits, autrement que par la violence. Ces sociétés évitent les jeux de compétition, et tout ce qui pousse à faire des gagnants et des perdants. Elles utilisent beaucoup l’humour, la plaisanterie ; elles donnent de la valeur à l’entente, au rire, à l’entraide, à la coopération. Et leurs enfants deviennent des adultes tout à fait dignes.
Pourquoi cette culture de douceur a-t-elle été effacée ? Peut-être cela a changé quand l’Etat est apparu, avec sa police, son armée, sa violence.
Aujourd’hui, nous ne vivons pas dans un monde de gentillesse et de bisounours. Mais ce n’est pas une raison pour ajouter de la violence à la violence. Selon des estimations, il y aurait en France deux enfants de moins de 18 ans tués chaque jour, le plus souvent par les parents. Donnons au contraire aux enfants, aux adultes de demain, le goût d’une autre manière de vivre.